Parole d’expert : Alex J Jefferies

Directeur chez MDI Digital Ltd

Après avoir été
diplômé de l’Arts Institute de Bournemouth, Alex J Jefferies a
commencé sa carrière en tant que 3D généraliste chez Digital
Progression pendant 7 ans. En 2008, il s’est installé à Norwich
pour prendre les rênes, avec Matthew Dartford, de MDI Digital Ltd
dont ils sont les deux membres. Ensemble ils produisent des oeuvres
numériques de qualité, mais également du contenu visuel pour la
publicité, l’édition et les industries multimédia. Avec près de 20
ans d’expérience, Alex aime toujours autant le monde de la 3D et
quand il ne travaille pas sur des projets professionnels, il met son
talent au service de ses propres créations.

Dîtes-nous en un
peu plus sur votre travail pour Xfinity Mobile : The Digital Dancers.
Comment avez-vous choisi et adapté les textures et la 3D au style de
chaque danseur ?

L’idée de départ
était que chaque danseur représente un style de musique et que cela
serait figuré par son apparence et sa façon de bouger. La
direction artistique de chaque danseur a été donnée par le client
et chacun avait ses propres challenges. On trouve énormément de
danseurs parmi les artistes qui font de la mocap et sur des réseaux
comme Instagram par exemple. Alors le but, c’était de de s’assurer
que chacun soit suffisamment original et inattendu. Pour le
personnage en boule disco, on avait besoin qu’il s’éclate en
pièces minuscules et se reforme. Le personnage lumineux prend vie à
partir de milliers de points brillants. Quant au personnage poilu, la
fourrure se sépare dans différentes directions et s’enroule dans
une sorte de houla hoop ! Un des plus gros défis de ce projet a
été de travailler avec de vrais danseurs pour créer et
chorégraphier la capture d’images. J’avais beaucoup d’expérience
dans la mocap mais notre studio maison était trop rudimentaire pour
capter l’intensité des mouvements comme on le souhaitait alors on
a upgradé notre installation en incluant la suite XSens MVN animate et tout s’est assemblé de manière vraiment sympa.

Vous créez des
rendus photoréalistes pour des marques prestigieuses comme Cadbury,
Philadelphia ou Puma : dans quelle mesure la combinaison 3ds Max +
V-Ray est-elle la meilleure pour le faire et en avez-vous essayé
d’autres ?

Je travaille sous
3ds Max depuis mon école d’art en 1999. Au fil du temps, j’ai
utilisé de nombreuses autres applications comme Maya ou C4D mais la
plus grande connaissance (et du coup la vitesse d’exécution) me
ramène toujours à 3ds Max. Cela étant, il y a tout un tas d’outils
3D que nous utilisons sur chaque projet comme ZBrush, Marvellous
Designer, Motion Builder, Substance Painter…etc. mais 3ds Max reste
notre principal cheval de bataille. Cela dit, je ne sais pas si ça
serait toujours le cas s’il n’y avait pas V-Ray. J’utilise
V-Ray depuis les toutes premières versions (autour de 2001 je
pense ?), c’en était au point où, alors que je travaillais
professionnellement depuis quelques mois seulement, je l’ai
installé secrètement sur mon PC du boulot. Une fois que tout le
monde a vu les résultats, ils ont instantanément changé et l’ont
adopté pour pratiquement tous les projets. Je sais qu’il existe
plusieurs autres moteurs fantastiques mais une fois encore,
l’habitude, la vitesse et les impératifs professionnels font qu’on
peut obtenir très vite le résultat que l’on veut avec V-Ray.
Honnêtement, j’aimerais vraiment essayer d’autres moteurs mais
je manque clairement de temps pour le faire.

Brexit, Covid… Depuis
quelques mois, le Royaume-Uni a été bousculé par différents
événements. Quels en seront les impacts sur le monde de la 3D et
dans l’industrie des VFX dans les prochaines années ?

Oh oui c’est vrai,
quelle année chargée ! Je n’ai vraiment aucune idée des
conséquences du Brexit sur notre industrie parce que même à ce
stade, personne ne sait encore réellement quelle forme il va
prendre. Mon associé et moi-même avons été anéantis quand nous
avons vu qu’une majorité de britanniques avait voté pour quitter
l’Europe et j’ai toujours le sentiment que c’est une erreur
catastrophique. J’ai de la famille et des amis un peu partout sur
le globe et je parcours régulièrement l’Europe pour le travail ou
le plaisir. L’idée que nos enfants n’auront pas ces mêmes
libertés et opportunités que les générations précédentes, moi y
compris, me déprime profondément.

Bien sûr, le Covid
19 est un bien plus gros problème maintenant et même après
quelques mois, nous sommes encore en train de nous adapter pour
travailler de chez nous. Je n’ai toujours pas accès à tout le
hardware que j’ai l’habitude d’avoir au bureau, principalement
parce qu’il n’y a pas la place dans ma maison ! Cela dit,
nous nous appuyons sur des solutions dans le cloud, des stations
remote et des renderfarms (comme le RANCH) et même s’il y a une
courbe d’apprentissage, on s’en sort plutôt bien.

Ce que
j’appréhendais, c’était un retour du crash de 2008 où une
grande quantité de travail a disparu en une nuit. Après tout, si
nous remettons les choses en perspective, ce que nous faisons n’est
pas vital. Mais jusqu’à présent, je n’ai jamais été aussi
occupé. Je pense que les limites de la distanciation sociale ont
poussé beaucoup d’entreprises à pivoter vers des options
d’animation 3D à la place des shootings photo ou du live action.
Le plus gros impact pour moi maintenant porte sur la gestion des
enfants. A la maison nous en avons deux, de 4 et 7 ans, et jongler
entre les devoirs, les repas et le business pour continuer à mettre
à manger sur la table est extrêmement difficile. La plupart de nos
clients sont sur le même bateau et sont très compréhensifs mais la
conséquence c’est qu’on peut travailler jusque très tard dans
la nuit pour rattraper les heures manquées dans la journée. Mais en
définitive, je suis reconnaissant d’être dans une industrie où
il y a toujours de la demande et même si voir et parler à des gens
en face à face me manque beaucoup, j’ai conscience qu’avoir un
job qui me permette de travailler à la maison sans trop de
perturbation est un vrai privilège.

D’un point de vue
personnel (et probablement naïf !), j’espère très
sincèrement qu’un événement aussi radical et universel que la
Covid-19 créera un sentiment d’unité international. Nous nous en
sortons pour l’instant et personne ne sait encore à quoi
ressemblera le monde d’après mais j’espère profondément que
cette expérience commune nous rapprochera plutôt qu’elle ne nous
divisera.

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